La rencontre gérontologique une merveilleuse aventure pour chacun !

On peut définir la rencontre intergénérationnelle de deux manières : la première est historique et liée à la culture familiale. On aime à dire qu’autrefois les personnes âgées demeuraient en famille au milieu des différentes générations qui la composent. De très nombreux témoignages en attestent, les plus jeunes étaient marqués par la présence quotidienne des plus anciens auprès d’eux.

 

Aujourd’hui, et ce, depuis quelques dizaines d’années, s’est ajoutée une autre forme de rencontre intergénérationnelle qui est essentiellement liée à l’allongement de la durée de vie, d’une part, et aux évolutions de la structure familiale, d’autre part. En effet, la personne âgée d’autrefois était rare et l’on expliquait sa longévité par sa robustesse personnelle. La personne âgée d’aujourd’hui est « nombreuse » et réputée fragile. Quel changement en si peu de temps !

 

Ainsi se noue un autre type de rencontre intergénérationnelle qui n’efface pas la première, mais la complète, c’est la « rencontre gérontologique ».

 

Elle est fondée sur le besoin d’être accompagnée et aidée dans sa vie quotidienne, pour ce qui concerne la personne âgée, et sur la motivation et la compétence des personnels gérontologiques qui sont, par définition, bien plus jeunes qu’elle et formés pour ce travail. Le modèle familial laisse son empreinte sur cette rencontre gérontologique ne serait-ce que par le vocabulaire utilisé (les mamies,…), mais la rencontre gérontologique est aussi motivée par une recherche plus ou moins consciente chez les professionnels de retrouver un espace intergénérationnel partiellement perdu ou « à réparer ». On peut entendre par là que les évolutions profondes de la structure familiale ont provoqué parfois des carences de lien intergénérationnel que cette nouvelle opportunité de travailler auprès de personnes âgées viendrait compenser.

 

 

Or, formellement, la rencontre gérontologique se présente et se justifie surtout par la nécessité d’apporter des réponses aux besoins des personnes âgées et, de ce fait, tient un peu trop en retrait les besoins des plus jeunes de partager aussi leur quotidien avec des anciens. Il est admis que l’on peut parfois se retrouver recruté comme professionnel gérontologique par hasard. Mais il est aussi admis que l’on ne reste pas en gérontologie par hasard !
Dans ce secteur, les métiers sont durs, souvent peu rémunérés et très peu gratifiants sur le plan social. Il y a quelques décennies les mutations de personnels hospitaliers en secteur gériatrique relevaient de la sanction !

 

 

Depuis quelques années, les choses changent progressivement. L’aide à domicile, mais aussi l’EHPAD, font un peu moins peur et les professionnels osent afficher plus ouvertement les motivations personnelles à travailler dans ce secteur. L’ouverture des EHPAD sur la cité, le rôle social des EHPAD et des services à la personne comme pourvoyeurs d’emplois y contribuent certainement. Est-ce pour autant suffisant comme explication ?
Non ! Il s’agit aussi de lieux pour vivre cette rencontre gérontologique nécessaire au maintien de l’intergénération comme « ciment » social et comme source potentielle de sens que l’on peut donner à sa vie.

 

Les personnes âgées ne peuvent être réduites à de simples consommateurs de services. Elles ont aussi à apporter ce dont les plus jeunes ont besoin, les valeurs des racines et de la transmission ainsi que de la distanciation face aux « choses de la vie ».

 

 

Ne réduisons pas les professionnels à leur seul savoir-faire. Leur présence aux côtés des personnes âgées repose aussi sur un remarquable savoir-être. Au-delà de compétences acquises, ils ont des talents qui relèvent de leur histoire, de leur monde émotionnel, de leur sensibilité et de leur personnalité. D’ailleurs, il suffit de les écouter pour saisir que lorsqu’on leur impose de s’en tenir au seul service rendu, les professionnels expriment leur frustration. Leurs motivations sont au-delà de la compétence. Leur motivation profonde est la rencontre avec des personnes âgées, le partage de leurs vulnérabilités réciproques. Il s’avère en effet que parmi les personnels gérontologiques, beaucoup d’entre eux ont eu des parcours de vie plus ou moins complexes pour toute sorte de raisons. Ce qui, au premier degré, pourrait apparaître comme une faiblesse est paradoxalement un véritable atout.

 

 

 

Plus modestement et plus singulièrement, la rencontre avec les personnes âgées est une véritable source de vie malgré les réelles difficultés des métiers de son accompagnement. Ceci est valable, quels que soient les niveaux dans la hiérarchie et les domaines de spécialités  !

 

 

Un exemple quelque peu extrême peut nous éclairer sur la question. Damien, un jeune de 25 ans, réputé pour sa marginalisation sociale du fait d’une complicité dans une affaire de meurtre, bénéficie d’un programme de réinsertion sociale et effectue un stage en EHPAD. Après huit jours de congés, il revient dans le service et se fait reprocher son absence par une résidente qui lui dit : « Je vous ai attendu une semaine ! ». Damien, ému, répond : « C’est la première fois que quelqu’un me dit que je suis attendu. Même ma mère ne me l’a jamais dit ! ».

Il n’y a pas d’autre commentaire pour illustrer ce qui nourrit et valorise la « rencontre  gérontologique » !